Les soupçons évoqués en avril dernier étaient fondés. Des démarches ont effectivement été entreprises en vue de fermer la scierie de Produits forestiers Petit Paris (PFPP) pour en transférer la garantie d’approvisionnement en bois à l’usine Arbec-Rémabec de L’Ascension.
Inquiet à l’idée que l’usine de Saint-Ludger-de-Milot puisse ainsi fermer ses portes, le syndicat a mené son enquête pour en avoir le cœur net.
« Il y a eu beaucoup d’évolution dans ce qu’on sait. Ses intentions [à Réjean Paré, le PDG d’Arbec] sont très claires : il veut avoir le contrat d’approvisionnement et la main-d’œuvre de Petit Paris pour faire marcher son usine d’Arbec de L’Ascension à plein temps », résume le président du syndicat, Pierre Godin.
Au sujet de la main-d’œuvre, le plan serait de réaffecter à l’usine de L’Ascension la moitié des salariés de la scierie de PFPP. Selon Pierre Godin, cela ne signifie pas que l’autre moitié perdrait son emploi. Plusieurs des employés touchés prendraient leur retraite, quoique de façon prématurée dans certains cas.
Advenant que l’usine de Saint-Ludger-de-Milot ferme ses portes, la victime, ce serait avant tout la municipalité, estime le président syndical.
« Ce serait un coup dur. On sait ce que ça fait quand une usine ferme ses portes dans une petite municipalité. Il peut y avoir une dévitalisation. »
En catimini
Dans toute cette histoire, ce que déplore surtout Pierre Godin, c’est le manque de transparence de l’administration.
« Tout ça était en train de se faire en cachette. L’usine serait morte de sa belle mort si on n’avait rien fait. Quand c’est sorti dans les journaux, on était à deux semaines de la fermeture. »
Il faut savoir que depuis 2020, le Groupe Rémabec est propriétaire de 50 % de la scierie de PFPP. Faute d’en être l'actionnaire majoritaire, le Groupe Rémabec n’a cependant pas le droit de vie et de mort sur l’usine de Saint-Ludger-de-Milot : les décisions doivent encore être soumises au conseil d’administration de la Coopérative forestière de Petit Paris.
Or, actuellement, la rentabilité de la scierie de PFPP n’est « pas du tout problématique ». Donc, aux yeux du conseil d’administration de la Coopérative, nul besoin de la fermer.
« C’est pour ça qu’il y a eu de la magouille, qu’il y a eu des menteries sur les chiffres. L’idée du Groupe Rémabec, c’était de faire croire à tout le monde que l’usine n’était pas rentable. Comme ça, ils auraient pu la fermer sans que personne ne dise un mot. »
Changements dans la direction
Par ailleurs, des têtes sont tombées peu après que les soupçons d’avril dernier aient été rendus publics.
Le directeur général de la scierie de PFPP, Alain Paradis, a depuis été remplacé par Stéphane Gagnon, également directeur général de la Coopérative forestière de Girardville.
Selon Pierre Godin, le directeur des finances de la coop aurait aussi été remplacé.
Et pour la suite?
Le président du syndicat croit que le seul scénario dans lequel la scierie de Saint-Ludger-de-Milot évite la fermeture, c’est celui où Rémabec décide de faire marche arrière.
« Autrement, ils vont finir par nous avoir à l’usure. En arrêtant d’injecter de l’argent dans l’usine, ça va éventuellement nous empêcher d’acheter du bois auprès du Bureau de mise en marché des bois (BMMB). »
Des travailleurs et des membres du syndicat de la scierie ont fait part de leurs inquiétudes au député de Lac-Saint-Jean, Éric Girard. Ce dernier affirme qu’encore il y a deux semaines, aucune demande de transfert de volume de bois n’avait été déposée au ministère des Ressources naturelles et des Forêts.
« Vu qu’il n’y a pas de demande de faite, je continue d’insister sur le fait que le syndicat et la direction doivent se parler. »
Une rencontre entre le président du syndicat Pierre Godin, le directeur général, Stéphane Gagnon ainsi que le président du conseil d’administration de la coop, Mathieu Simard, devait avoir lieu le mercredi 29 moi.
Le Groupe Rémabec n’a pas répondu à la demande d’entrevue du journal Le Lac-St-Jean.