Au Collège d’Alma, l’insécurité alimentaire demeure difficile à mesurer, mais ses effets se font sentir jusque dans les salles de classe.
Bien qu’aucune donnée officielle ne permette pour l’instant de brosser un portrait précis de la situation, plusieurs signes laissent croire que la précarité alimentaire touche une part importante de la population étudiante.
Selon les observations de Mélissandre Morissette, enseignante en Techniques d’administration et de gestion et bénévole impliquée dans les initiatives de lutte contre la précarité alimentaire au Collège d’Alma, le phénomène serait sous-estimé.
« Ce que je vois et ce que je vis dans mes classes, parce que j'essaie de faire des activités en lien avec ça, c’est que ça touche beaucoup les étudiants internationaux. », souligne-t-elle.
Selon elle, cette catégorie d’étudiants serait plus encline à parler ouvertement de leurs difficultés et à aller chercher de l’aide en raison de leur situation particulière, les plaçant d’emblée dans une forme de précarité économique.
À l’inverse, plusieurs étudiants québécois hésiteraient à admettre qu’ils ont de la difficulté à se nourrir adéquatement. Chez eux, la honte et la peur du jugement contribueraient à rendre le phénomène largement invisible.
« Parfois, quand on parle à des étudiants qui ne vont pas bien et qui travaillent trop, et qu’on leur propose de travailler moins, ils nous répondent qu’ils ne peuvent pas, car ils ont des choses à payer. », explique Mélissandre Morissette.
Selon l’enseignante, il ne serait pas exagéré de croire que près d’un étudiant sur deux vit une forme de précarité alimentaire au Collège d’Alma.
Des solutions locales pour répondre au problème
Devant cette situation, le cégep a mis en place plusieurs initiatives. Une forêt nourricière a notamment été aménagée aux abords de l’établissement en 2024. Regroupant 1200 végétaux comestibles et 50 arbres fruitiers, la forêt permet aux étudiants de se procurer gratuitement des légumes, des fruits, des fleurs comestibles et médicinales, ainsi que des fines herbes.
« Nous en avons aussi une [forêt nourricière] devant le Centre Mario-Tremblay et une autre au bout de la rue Dollard », précise Mélissandre Morissette.
Autre projet mis en place par le cégep depuis plus de quatre ans, la Place du marché, anciennement appelée @Ri:Frigo partage@Ri, qui permet aux étudiants de mettre la main sur des denrées alimentaires variées gratuitement.
Le projet est réalisé grâce au soutien de plusieurs partenaires, dont Les Butineurs, un organisme qui récupère les surplus des récoltes agricoles et des jardins individuels pour les offrir à des organismes d’aide alimentaire.
Devant l’augmentation marquée de la demande, l’accès à la Place du marché, autrefois ouvert à l’ensemble de la communauté collégiale, est désormais réservé exclusivement aux personnes étudiantes.
Finalement, chaque année, le Collège d’Alma met sur pied la distribution sporadique de paniers de Noël pour les étudiants en difficulté. En 2023, 51 paniers ont été remis, comparativement à 65 en 2024, une hausse qui illustre la croissance des besoins d’une année à l’autre.
Maintenir les acquis
Des actions complémentaires ont aussi été effectuées pour lutter contre la précarité financière de manière plus générale, comme la distribution gratuite de serviettes hygiéniques et de tampons par les étudiants en Soins infirmiers.
« On oublie souvent ça, mais à l’épicerie, si tu n’as pas d’argent pour acheter du lait, qu’est-ce que tu choisis en premier : du lait ou une boîte de tampons? », soulève Mélissandre Morissette.
En parallèle, une réflexion a été amorcée au Collège d’Alma concernant la potentielle création d’un café étudiant proposant des repas nutritifs à prix modique, à l’image de ce qui se fait dans d’autres établissements collégiaux. En attendant, le cégep mise sur le renforcement des initiatives déjà en place.