Alma revient à la charge dans le dossier de l’expropriation de Danny Pelletier, propriétaire de terrains dans le centre-ville d’Alma. Après un long processus judiciaire, le citoyen sera finalement contraint de céder à la municipalité le terrain situé à l’angle des rues Saint-Joseph et Scott Ouest afin que le Collège d’Alma puisse y construire une résidence étudiante.
Le dossier a été judiciarisé après des négociations infructueuses entre Danny Pelletier et la Ville entourant l’achat du terrain.
La Cour supérieure du Québec avait d’abord, en janvier 2025, donné raison à la Ville d’Alma en rejetant la demande de contestation du citoyen qui refusait de vendre son terrain. Danny Pelletier a ensuite porté la cause devant la Cour d’appel du Québec, qui a quant à elle tranché en sa faveur le 27 octobre dernier, radiant par conséquent l’avis d’expropriation émis par la municipalité. Cela signifiait que Danny Pelletier pourrait conserver son terrain.
Cependant, dans son jugement, la Cour d’appel avait reconnu le droit d’expropriation de la Ville, mais lui avait refusé en vertu du manque de précisions données concernant les fins pour lesquelles elle souhaitait faire l’acquisition du terrain.
C’est ainsi que lundi dernier, par le biais d’une résolution, la Ville d’Alma a précisé que l’expropriation était liée à l’éventuelle construction d’une résidence étudiante par le Collège d’Alma.
« Au fond, ce qu’ils voulaient [la Cour d’appel] pour nous donner le feu vert, c’est qu’on dise clairement pour qui on voulait faire l’expropriation, et c’est ce qu’on a fait en mentionnant le Collège d’Alma dans une résolution », explique le directeur général de Ville d’Alma, Frédéric Lemieux.
À moins d’une autre action en justice de la part de Danny Pelletier, l’expropriation pourra donc aller de l'avant.
« L’acquisition par expropriation est ainsi mise en œuvre, en l’espèce, par l’application combinée des pouvoirs prévus à l’article 570, alinéa 1, paragraphe c) et à l’article 29, alinéa 1 paragraphe 1.1 de la Loi sur les cités et villes », peut-on lire dans la résolution.
La Ville a le droit
Rappelons qu’une Ville peut recourir à l’expropriation dans la mesure où cette opération s'avère nécessaire à la réalisation d’un projet d’utilité publique.
L’expropriation d’un droit peut être exécutée à des fins de développement urbain, pour lutter contre la spéculation, pour des projets d’aménagement ou pour des raisons dites « d’utilité publique », auquel cas l'opération doit être justifiée. L’expropriation de Danny Pelletier s’inscrit dans ce dernier cas de figure. En ce sens, le projet de résidence étudiante est considéré d’utilité publique puisque d’une part, il vise à répondre à la pénurie de logements qui sévit à Alma en proposant une alternative à la communauté estudiantine, et d’autre part, car une résidence étudiante située dans le centre-ville contribuera directement à la revitalisation de celui-ci.
Par ailleurs, pour exproprier un droit, il n’est pas nécessaire d’avoir obtenu les autorisations requises pour la réalisation du projet en question ni de remplir les conditions préalables à cette réalisation qui sont prévues par d’autres lois.
Danny Pelletier plaide sa cause devant le conseil
Danny Pelletier était dans la salle lors du plus récent conseil de Ville d’Alma, le 17 novembre dernier. Il était venu « s’assurer que les gens ici [les membres du conseil] étaient conscients des impacts de ce projet-là ».
« Qu’est-ce que vous diriez si je vous disais que demain matin, vous perdiez 50 % de votre projet de fonds de pension pour un projet qui est PEUT-ÊTRE réalisable. C’est ce que je vis présentement », a-t-il soulevé d’emblée.
Danny Pelletier, alors au micro du conseil municipal, a poursuivi, affirmant : « les preuves fournies par la Ville dans le cadre de ma contestation démontrent que pour la phase 1 du projet, mon terrain n’est pas nécessaire. La phase 2 aura peut-être lieu dans cinq ou six ans dépendamment du financement, du gouvernement en place puis des objectifs. Est-ce qu’il y a d’autres avenues qui ont été regardées avant de dire que ça vous prenait ce terrain-là sans faute? », a demandé Danny Pelletier.
Autrement dit, le citoyen se demande pourquoi la municipalité s’obstine à faire l’acquisition de son terrain alors que selon lui, à la lecture de la documentation déposée, le projet de résidence étudiante serait encore loin d’être coulé dans le béton. De surcroît, il dit avoir l’impression d’être victime d’une vengeance de la part de la Ville, estimant que « parce qu’il a refusé les négociations de gré à gré, on cherche à le punir ».
Au témoignage de Danny Pelletier, la mairesse d’Alma, Sylvie Beaumont, a répondu qu’étant donné qu’il s’agissait d’un dossier judiciarisé, elle préférait « laisser la place aux juristes pour s’en occuper ». « On vous entend, a-t-elle dit, mais je n’ai pas de réponse à ce que vous dites. C’est votre interprétation [de la situation], mais ce sont les juristes qui pourraient vous répondre. »
Danny Pelletier a ensuite fait valoir que si le dossier avait été judiciarisé au départ, ce n'était pas car il le souhaitait, au contraire, mais bien car la Ville et son conseil avaient décidé de poursuivre le processus d’expropriation malgré son refus initial de céder son terrain. Le plaignant voulait ainsi insister sur la responsabilité du conseil municipal dans l’émergence du litige.
La Ville d’Alma a réitéré son désir de parvenir à une entente de gré à gré d’ici à l’exécution de l’expropriation. Selon Frédéric Tremblay, la compensation offerte à Danny Pelletier pour son terrain est équivalente à la valeur marchande de la propriété.